« Le milieu en tant que tel, donc les adultes doivent eux aussi être entraînés dans un mouvement enthousiasmant de promotion culturelle. Car il ne s’agit pas de sacrifier une génération, comme le préconisent certains. Il ne peut pas non plus être question de nous leurrer de l’illusion qu’il est possible de galvaniser efficacement les énergies des jeunes en laissant de côté leurs parents. Il faudra renoncer aussi à cette idée chère à certains et qu’aucune expérience ne confirme, que l’action auprès des jeunes entraînerait tôt ou tard les parents.
Autrement dit, il ne nous appartient pas, après avoir abandonné un milieu au pire dénuement pendant des générations, de lui apporter demain de nouvelles perplexités et angoisses en créant des ruptures brutales entre parents et enfants.
Les musées, les chefs-d’œuvre de l’architecture, les jardins publics de qualité, le théâtre, les grands films, tous les fruits de l’expression artistique dont est généreusement parsemé le chemin des citoyens aisés, peuvent et doivent désormais être répartis plus équitablement. Il y a des manières à trouver d’apporter l’art et la beauté « dans la rue », en zone sous-prolétarienne, sans les déprécier et sans traiter les nouveaux bénéficiaires au rabais.
Il y a des manières à expérimenter, d’émerveiller les yeux, de bousculer les esprits demeurés dans la nuit, de secouer les pauvres routines, de faire éclater le renfermement des laissés-pour-compte de notre civilisation. Des antennes culturelles, des bibliothèques, des carrefours de toutes sortes sont à innover, où une population ignorante, même adulte, peut puiser le goût du savoir et acquérir les connaissances indispensables pour la participation à la vie moderne.
Radio et télévision, instruments de choix de l’acculturation des masses, devront apprendre à s’acquitter enfin de cette vocation. Au lieu de mépriser leur public non-intellectuel en lui servant des programmes de divertissement médiocre, elles institueront des programmes culturels étudiés de façon à éveiller, par leur forme et leur langage comme par l’heure des émissions, l’intérêt des milieux défavorisés ».
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