Nous n’avions rien que nos personnes à offrir

Dans le liminaire de son livre « Les pauvres sont l’Eglise », après avoir évoqué son enfance dans le texte « Petit enfant dans le cercle infernal des violences », le père Joseph raconte les débuts du Mouvement ATD Quart Monde et en explique les motivations principales en les resituant dans le contexte de l’histoire contemporaine.

Nous ne sommes pas des créateurs, seulement des héritiers. D’autres ont ébauché, dans l’Eglise contemporaine, en France et dans le monde, des mouvements de rencontres des pauvres, du peuple des exclus. Des hommes comme l’Abbé Henri Godin 1, le Père Depierre2, l’Abbé Pierre3ont ouvert des portes, pénétré dans le monde de la misère. Nous sommes placés au sein d’un courant spirituel, d’intelligence du coeur plus que d’idées, qui a rencontré les pauvres, les gens de la misère. Mouvement de lutte pour la paix, lutte pour le pain, combat pour la justice, ces combats et actions se rejoignent en quelque point dans le souci de l’homme le plus méprisé. Nous ne sommes pas des créateurs, bien que la misère nous y entraîne, peut-être sommes-nous des innovateurs.
Où se trouve notre originalité ? Quand le Mouvement Aide à Toute Détresse Quart Monde a commencé, la société était sûre d’elle; tout le monde pensait que le progrès lié à l’assistance allait supprimer la misère de façon automatique et inéluctable, on était sûr de la victoire. Dans ce contexte, comment, à tous les niveaux, pouvait-on croire à ce que nous disions de la misère ? Voilà la difficulté majeure à laquelle nous nous heurtions.

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  1. GODIN Henri (Abbé) : Coauteur avec Yvan Daniel en 1942 de « France, pays de mission ». L’ouvrage suscita la création, en 1943, de la Mission de Paris avec l’envoi de prêtres en monde ouvrier par le Cardinal Suhard. Celle-ci essaima en province de 1944 à 1946 sous le nom de « Mission de France ». Le mouvement dit « des prêtres ouvriers » sera suspendu en 1954 car jugé trop proche des activités syndicales et de la philosophie marxiste avant d’être de nouveau autorisé à partir de 1965 à l’issue du concile Vatican II
  2. DEPIERRE André (Père) : né en 1920, il fut l’un des fondateurs de la Mission de Paris, s’implantant à Montreuil à la fin de la seconde guerre mondiale. Après le concile Vatican II, il fut désigné par le Comité épiscopal de la Mission Ouvrière pour animer la mise en place des nouvelles équipes de prêtres au travail sur le plan national
  3. PIERRE Abbé (Henri Grouès) :  1912-2007. Fondateur des Compagnons d’Emmaüs. A la suite de son appel de détresse de l’hiver 1954, des familles accourent par centaines, soulevées par l’espoir de trouver un logement et sont accueillies à Paris, Porte de Vanves et Porte d’Orléans, sous la tente. Puis, c’est l’achat d’un terrain, dit du « Château de France », une ancienne carrière, sur le territoire d’une petite commune de l’Est parisien, Noisy-le-Grand, qui à l’époque comptait 10 000 habitants. En quelques mois, plus de 2 000 personnes s’y ajoutent, augmentant brutalement la population communale de 20%. A l’entrée du camp, il fait apposer un panneau qui proclame : « Cette cité est à l’honneur de ceux qui, par leur travail et leurs dons, ont permis de l’établir et à la honte d’une société incapable de loger dignement ses travailleurs ». Ce sont d’abord des tentes, à nouveau, qui accueillent les habitants. Puis, en novembre 1954, avec l’aide financière de Charlie Chaplin et des Chocolateries de France, sont construits des abris en fibrociment, appelés « igloos » en raison de leur forme de demi-cylindre. Ce camp dit « des sans logis » sera fermé en 1971
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